Wayãpi

De Entrelangues
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Le wayãpi (prononcer [wajã'pi]) se trouve aussi, dans certains travaux plus ou moins anciens, sous les orthographes oiampí, oiumpian, oyampí, oyapí, wajapi, wayapi. En anglas, l'orthographe qui est désormais la plus répandue est la forme wayampi. En portugais et en wayãpi du Brésil, on trouve de nos jours surtout la forme wajãpi.


Aire géographique : Il s'agit d'une langue de Guyane française qui est également parlée au Brésil. En Guyane Française, le wayãpi est parlé par plusieurs communautés réparties le long du fleuve Oyapock. Au Brésil, il est parlé à l'ouest de l'état d'Amapá. D'après SIL.org (2008), il serait aussi parlé sporadiquement sur la rivière de l'est Paru au nord est de Pará. Ce dernier fait n'est toutefois pas confirmé.

Situation typologique (famille de langues) : Il s'agit d'une langue amérindienne appartenant à la famille tupi-guarani (branche VIII de la classification historique des langues tupi-guarani de Rodrigues & Cabral (1984)) qui, elle-même, appartient au phylum des langues dites tupi. Le wayãpi est, avec le teko, la langue tupi-guarani qui est parlée le plus au nord de l'aire géographique actuelle des langues tupi-guarani.

Bien qu'étant considéré à la suite de classification mentionnée ci-dessus comme proche du teko, le wayãpi s'en distingue en réalité assez fortement. Si l'organisation grammaticale de ces deux langues présente indéniablement un certain nombre de points communs, leur phonologie et leur lexique sont dans les faits très différents. Il en résulte que, à l'exception des Wayãpi de Camopi (où les Wayãpi côtoient des Teko), l'intercompréhension entre le wayãpi et le teko est très difficile. On pourra noter en particulier un nombre relativement important de faux amis entre les deux langues.

Principaux dialectes : Les différents parlers wayãpi peuvent être regroupées en deux grandes aires dialectales.

  • Le wayãpi septentrional (ou wayãpi guyanais, ou wayãpi de l'Oyapock) est parlé en Guyane française par deux communautés distinctes : au nord, celle du village de Camopi (où les Wayãpi cohabitent avec des Teko), au sud, celle dite de Trois Sauts. Cette dernière communauté se répartit elle-même géographiquement le long de l'Oyapock en quatre villages distincts : Yawapa, Pina, Zidoc et Roger. Les groupements de Camopi et de Zidoc sont ceux dont la population wayãpi est la plus nombreuse. Même si quelques différences existent, les parlers wayãpi parlés à Camopi et à Trois Sauts sont très proches l'un de l'autre.
  • Le wayãpi méridional (ou wayãpi brésilien, ou wayãpi-puku) est parlé au Brésil, dans une centaine de villages (IEPÉ, 2019) répartis dans le centre-ouest de l’état brésilien de l’Amapá, au sein de la Terre indigène wayãpi, une région forestière délimitée par les rivières Amapari, Jari, et Inipucú. On distingue habituellement deux variantes dialectales, très proches l'une de l'autre : celle de l'Amapari et celle du Jari. Le wayãpi méridional présente un certain nombre de divergences (phonologiques, grammaticales et lexicales) par rapport au wayãpi septentrional. Les deux dialectes demeurent toutefois à l'heure actuelle parfaitement intelligibles entre eux.
[code ISO-639] : oym

Sociologie de la langue

critères de vitalité selon l'UNESCO

Cette partie renseigne les 9 principaux facteurs d'évaluation de la vitalité d'une langue selon l'Unesco (2003).

Transmission inter-générationnelle de la langue

Facteur 1 : La transmission inter-générationnelle est sûre dans la plupart des communautés wayãpi, que ce soit en Guyane française ou au Brésil. La pression linguistique du français et du portugais ne semble pas affecter, tout du moins pour le moment, la transmission intergénérationnelle. La langue est parlée au quotidien par toutes les générations. Certains Wayãpi, pour l'essentiel quelques personnes âgées et quelques femmes, ne parlent que le wayãpi.

Nombre absolu de locuteurs

Facteur 2 : D'après socioambiental.org (2023), au début des années 1990 on comptabilisait 498 Wayãpi au Brésil (recensement de 1994) et 412 en Guyane française (recensement de 1992). Toutefois, en raison de la baisse de la mortalité infantile et, surtout côté guyanais, de la sédentarisation désormais quasi systématique, la population de Wayãpi croît fortement. Ainsi, d'après Léglise & Migge (2007 : 267), en 1999, Trois Sauts comptait environ 500 locuteurs de wayãpi et Camopi approximativement 700. SIL.org (2008) affirme qu'il existait au début des années 2000 quelques milliers de locuteurs de Wayãpi. En l'absence de recensement récent, on estimait au début des années 2010 la population des Wayãpi de Guyane française à environ 2000 individus. Au Brésil, les statistiques sont plus précises puisque, en 2019, l'IEPÉ dénombrait précisément 1454 Wayãpi au sein de la Terre indigène wayãpi.

Proportion de locuteurs dans la population globale

Facteur 3 : Au Brésil, où la langue est également enseignée massivement à l'école primaire, elle est de 100 %. En Guyane française, où les enfants ne bénéficient pas d'un enseignement complet en wayãpi, la proportion semble être également de 100 %. En 2011, à Trois Sauts, tout Wayãpi parlait encore le wayãpi en qualité de locuteur natif. A Camopi, où le plurilinguisme est plus important qu'à Trois Sauts, la situation sociolinguistique n'est pas connue avec précision.

Tendances dans les domaines des langues en présence

Facteur 4 : On observe une situation de diglossie qui est plus ou moins prononcée selon les communautés. D'une manière générale, malgré un nombre de plus en plus important de Wayãpi maîtrisant le français (en Guyane française) ou le portugais (au Brésil), l'usage de ces langues dominantes est généralement réservé au domaine officiel et public avec les acteurs externes à la communauté (personnel soignant, représentants de l'ordre public, commerçants). Le wayãpi, qui est employé dans tous les autres contextes de communication, demeure la langue du quotidien. On peut aussi signaler qu'un nombre relativement important d'unités lexicales sont empruntés par les locuteurs wayãpophones à la langue dominante (français, portugais) et, plus particulièrement en Guyane française, également aux autres langues environnantes (langues créoles).

Réponse aux nouveaux domaines et médias

Facteur 5 :

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Matériel pédagogique et accès à l'écrit

Facteur 6 = 2 (en Guyane française) ; 3, voire 4 (au Brésil)

En Guyane française, quelques polycopiés "élémentaires" (abécédaires, listes d'unités lexicales, exercices à trou) ont été rédigés par des membres de l'Education Nationale non wayãpophones en utilisant un système d'écriture, exclusivement phonétique, qui a été introduit à l'origine par des ethnologues français dans les années 1970. Quelques petits récits en vidéo illustrés et racontés par des enfants wayãpi ont également été réalisés dans un cadre scolaire, notamment à Camopi. Certains de ces récits présentent du texte en wayãpi rédigé au moyen du même système d'écriture. D'une manière plus générale, les Wayãpi de Guyane ont tout de même fini par adopter ce système d'écriture, dont la particularité est de contenir certains caractères de l'A.P.I. qui ne peuvent pas être tapés aisément avec un clavier usuel. Ceci ne les empêche toutefois pas de communiquer entre eux par sms ou via les réseaux sociaux, moyennant quelques adaptations graphiques (graphème <+> au lieu du graphème <ɨ> pour noter le phonème /ɨ/, trait de nasalité des voyelles nasales phonologiques non notés, fluctuation dans la notation de certaines voyelles et dans la segmentation en mots graphiques).

Au Brésil, l'accès à l'écrit des Wayãpi est bien plus avancé qu'en Guyane française. L'IEPÉ, dont l'une des missions consiste à former des enseignants wayãpi dans le cadre d'un enseignement bilingue wayãpi-portugais, a développé divers supports pédagogiques. Le système d'écriture qui est utilisé pour cela est très proche de celui employé pour noter les autres langues tupi-guarani au Brésil (mais aussi celles du Paraguay, de Bolivie et d'Argentine) depuis plusieurs siècles. Son atout principal est de n'utiliser que des caractères tapables avec un clavier usuel. Un certain nombre d'adultes wayãpi brésiliens ("os pesquisadores e professores Wajãpi") ont été spécifiquement formés dans les années 2000 pour raconter par écrit leurs savoirs dans le cadre d'un projet mené, notamment, par l'anthropologue brésilienne Dominique Gallois. Il en a résulté un corpus écrit monolingue relativement important pour une langue d'Amazonie, dont malheureusement une partie seulement est en accès libre sur internet. Grâce au travail accompli par certain.e.s anthropologues brésilien.ne.s, il existe également quelques supports en wayãpi qui traitent de divers aspects sanitaires. L'alphabétisation en langue maternelle étant déjà ancienne et les réseaux de téléphonie étant plus développé au Brésil qu'en Guyane française, les Wayãpi du Brésil emploient massivement ce système d'écriture pour communiquer entre eux par sms ou via les réseaux sociaux.

Mentionnons pour terminer l'existence d'un certain nombre de documents évangéliques en langue wayãpi, notamment au Brésil : une version en wayãpi de l'Amapari (audio et sous-titres) du film Jésus de Peter Sykes et John Krish, une traduction - très libre - du Nouveau Testament en wayãpi de l'Amapari, quelques petits contenus vidéo racontant des passages de la Bible en wayãpi de Guyane.

Politique linguistique

Facteur 7 = 1 'assimilation forcée' (en Guyane française) ; 3 'assimilation passive (au Brésil)

En Guyane française, l'assimilation est active, voire même forcée (Launey, 2012; Tritsch, 2013). La langue dominante, le français, est la seule langue officielle. La France ayant signé mais pas ratifié la Charte européenne des langues régionales et minoritaires, le wayãpi ne jouit d'aucun intérêt véritable de la part des institutions de ce pays. A l'école primaire, il n'y a, au plus, qu'une heure de wayãpi par semaine. Aucun linguiste (phonologue et/ou grammairien) n'est jamais consulté pour développer, en collaboration avec des Wayãpi, du matériel pédagogique et/ou didactique.

Le Brésil ayant signé et ratifié la Convention 169 de l'Organisation internationale du travail relative aux peuples indigènes et tribaux "les populations [autochtones] y ont des droits spécifiques et un système d’éducation adapté" (Launey, 2014). Il en résulte que, même si le portugais est considéré comme la seule langue officielle, le regroupement des populations autochtones de ce pays au sein de Terres indigènes spécifiques rend possible un enseignement bilingue. Néanmoins, l'attitude du gouvernement central brésilien à l'égard des populations autochtones dépend fortement de son bord politique. Le cadre juridique et le travail réalisé par certains organismes publics (FUNAI), associations indigénistes (IEPÉ, Instituto Socioambiental) visent cependant, malgré les pressions en tout genre, à protéger de plus en plus les langues et les cultures des populations autochtones, wayãpi y compris.

Attitude des membres de la communauté vis-à-vis de la langue

Facteur 8 = 4 (en Guyane française) ; 5 (au Brésil)

Les Wayãpi sont particulièrement attachés à leur langue. Toutefois, dans la mesure où la transmission inter-générationnelle de la langue est encore excellente et où certaines communautés sont encore particulièrement isolées (Trois Sauts, Jari), la plupart d'entre eux ne semble pas encore percevoir le risque de transfert linguistique qui pèse à terme sur eux. Ce risque est d'autant plus important que les jeunes générations, une fois arrivées à l'adolescence, manifestent de plus en plus un rejet de tout ce qui à un rapport quelconque avec leur culture traditionnelle. Ce phénomène est particulièrement prégnant en Guyane française, où la situation sociale est bien plus dégradée qu'au Brésil.

Quantité et qualité de documentation

Facteur 9 = 2

La documentation linguistique est insuffisante. Pour ce qui est du wayãpi septentrional, il s'agit pour l'essentiel d'un dictionnaire bilingue wayãpi-français (Grenand, 1989), qui explore surtout les champs lexicaux de la faune, de la flore et de l'artisanat, ainsi que deux ébauches grammaticales (Grenand, 1980; Copin, 2012), qui ont été rédigées dans des cadres théoriques différents. Concernant le wayãpi méridional, il existe un certain nombre d'articles publiés, notamment par des linguistes missionnaires du Summer Institute of Linguistics, traitant de phonétique historique et de quelque point particulier de phonologie ou de grammaire. Il est à noter que la plupart de ces articles sont inaccessibles publiés pour la communauté des chercheurs.

études sociolinguistiques

  • Alby, S. & I. Léglise. 2005. 'L'enseignement en Guyane et les langues régionales, réflexions sociolinguistiques et didactiques', Marges Linguistiques 10. texte.
  • Léglise I. & B. Migge (dir.). 2007. Pratiques et représentations linguistiques en Guyane : regards croisés. Paris, IRD Editions. texte.
  • DGLFLF. 2004. Les langues en Guyane, Bulletin de l'observatoire des pratiques linguistiques, Langues et cité 3.
  • Launey, M. 2012. 'Des linguistes à l'école en Guyane ou l'introduction de langues « mineures » dans un contexte glottophobe', Cahier de l'Observatoire des pratiques linguistes 3, Délégation générale à la langue française et aux langues de France, 129-140. texte
  • Launey, N. 2014. 'L’accès à l’éducation chez les Amérindiens de Guyane : comparaison entre les politiques menées chez les Wayampis du Brésil et de Guyane' [Document non publié] texte
  • Tritsch, I. 2013. Dynamiques territoriales et revendications identitaires des Amérindiens wayãpi et teko de la commune de Camopi, Thèse de doctorat, Université Antilles Guyane. texte.

ouvrages pédagogiques

  • Olson, R. 1978. Dicionário por tópicos nas línguas oiampi (wajãpi) - português, Sociedade Internacional de Lingüística, Cuiabá, MT. texte
  • Grenand, F. 1989. Dictionnaire wayãpi-français. Paris, CNRS Editions.

corpus papier

  • Grenand, F. 1978. La tortue et le jaguar : Mythe wayãpi (Guyane), Amerindia 3, 183-194.
  • Jensen C. J. 1993. Wayampi Texts - Amapari Dialect, Summer Institute of Linguistics.
  • Jensen C. J. 1993. Wayampi Texts - Jari Dialect, Summer Institute of Linguistics.
  • Olson, G. 1976. 18 Histórias no Dialeto Jarí, Sociedade Internacional de Lingüística, 23 p.
  • Olson, G. 1977. Wajãpi Stories of Enchanted Beings, Summer Institute of Linguistics, 30 p.
  • Pesquisadores e professores Wajãpi. 2005. Taa rewarã, São Paulo, Apina & Iepé. [1]
  • Pesquisadores e professores Wajãpi. 2006. Ija mã'ë kõ, São Paulo, Apina & Iepé. [2]
  • Pesquisadores e professores Wajãpi. 2006. Moraita rewarã, São Paulo, Apina & Iepé. [3]
  • Pesquisadores e professores Wajãpi. 2007. Javĩ rewarã, São Paulo, Apina & Iepé. [4]
  • Pesquisadores e professores Wajãpi. 2008. Jane rekoa werã, São Paulo, Apina & Iepé. [5]
  • Pesquisadores e professores Wajãpi. 2008. Jimotekokuwa, São Paulo, Apina & Iepé. [6]
  • Pesquisadores e professores Wajãpi. 2008. Jane reko rẽ jimo'ea, São Paulo, Apina & Iepé. [7]
  • Pesquisadores e professores Wajãpi. 2008. I'ã, São Paulo, Apina & Iepé. [8]
  • Pesquisadores e professores Wajãpi. 2009. Jane reko mokasia, São Paulo, Apina & Iepé. [9]
  • Pesquisadores e professores Wajãpi. 2012. Temitãgwerã kõ rẽ jimo'ea, São Paulo, Apina & Iepé. [10]
  • Renault-Lescure O., F. Grenand & E. Navet. 1987. Contes amérindiens de Guyane, Paris, CILF, 160 p.

Linguistique

descriptions linguistiques

  • Baraúna, F. A. 2016. Perfil comparativo-tipológico das consoantes nasais em línguas da família Tupí-Guaraní, Mémoire de master, Universidade Federal do Pará. texte.
  • Carvalho, F. O. 2022. 'An outline of the phonetics and phonology of the Amapari dialect of Wajãpi (Tupi-Guarani)', ms. texte.
  • Carvalho, F. O. 2023. Wajãpi (Brazil, French Guiana) – Language Snapshot, Language Documentation and Description, 23(1):5. [11]
  • Copin, F. 2012. Grammaire wayampi (famille tupi-guarani), Thèse de doctorat, Université Paris Diderot. texte
  • Copin, F. 2023. 'Noms et verbes en wayãpi', Amerindia, 44, 135-213.
  • Copin, F. soumis. 'Hierarchical alignment and person auxiliaries in Wayampi', ms.
  • Grenand, F. 1980. La langue wayãpi : Phonologie et grammaire, Paris, SELAF, 121 p. [12]
  • Jensen, A. A. 1979. Comparação Preliminar das Línguas Emerillon e Oiampi no seu Desenvolvimento do Proto Tupi-Guarani, Summer Institute of Linguistics. texte
  • Jensen, A. A. 1977. 'Preliminary Phonology Statement Oiampí', Summer Institute of Linguistics.
  • Jensen, A. A. 1980. 'Paragraph Boundaries in Oiampí', Summer Institute of Linguistics.
  • Jensen, A. A. 1994. 'Wayampi', Typological Studies in Negation, ed. by P. Kahrel and R. van den Berg, Amsterdam, John Benjamins, 343-364.
  • Jensen, C. J. 1982. 'Partículas em Wayãpi', Sociedade Internacional de Lingüística.
  • Jensen, C. J. 1984. O desenvolvimento histórico da lingua Wayampi, Thèse de doctorat, Universidade de Campinas. texte
  • Jensen, C. J. 2022. 'Word Order in Oiampí', Summer Institute of Linguistics.
  • Jensen, C. J. 1989. The Historical Development of the Wayampi Language, Editora da UNICAMP.
  • Olson, G. 1978. Descrição Preliminar de Orações Wajãpi, Sociedade Internacional de Lingüística, Cuiabá, MT. texte

linguistique formelle

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Ressources numériques

corpus

Key, Mary Ritchie & Comrie, Bernard (eds.) 2015. The Intercontinental Dictionary Series. Leipzig: Max Planck Institute for Evolutionary Anthropology. https://clics.clld.org/languages/ids-292

outils informatiques

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applications

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bibliographie TAL

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